L’équipe de Métallurgie Structurale de l’IRCP accueille une stagiaire en Recherche Création

Recherche
6 février 2025
poster_large

Quand l’art et la science se rencontrent : une collaboration transdisciplinaire au sein de l’ Institut de Recherche de Chimie Paris (IRCP), équipe de Métallurgie Structurale (MS). Etudiante en art, Eva Daniau,  a récemment  rejoint l’équipe de recherche en Métallurgie Structurale pour un stage de six mois. Une rencontre surprenante entre science et création, où matériaux, formes et concepts s’entremêlent pour repousser les frontières de la transdisciplinarité.

Eva Daniau a suivi une formation ARRC (Année de Recherche en Recherche Création) de l’ENS Saclay et a effectué un stage de 6 mois au sein de l’équipe Métallurgie Structurale de l’IRCP. Accueillie par Lola Lilensten, chargée de Recherche CNRS, cette rencontre inattendue entre sciences des matériaux et création artistique s’est avéré fructueuse !

Arts de la Science et Sciences de l’art. Lors de son stage, Eva Daniau a pu réaliser un projet de création artistique libre et a conçu et fabriqué des ateliers créatifs structurants (ateliers d’écriture et ateliers de collage) en milieu scientifique à destination des doctorants et personnels de la recherche. Eva Daniau est artiste dans le domaine de la recherche-création, et grâce ce stage, elle a pu faire découvrir sa démarche artistique au sein du milieu scientifique. Les ateliers créatifs ont pris la forme d’ateliers encadrés d’écriture et de collage qui ont été testé au sein de l’équipe MS, dans d’autres laboratoires, puis au sein d’une conférence scientifique, lors des journées annuelles de la Société Française de Métallurgie et de matériaux (SF2M). Ils permettent de travailler réflexivement sur l’univers du laboratoire à partir d’outils créatifs, pour appréhender nos domaines sous une perspective différente et, pourquoi pas, ouvrir de nouveaux horizons. C’est aussi l’occasion de s’offrir une pause et de prendre un peu de recul sur notre cadre de travail ! La démarche d’Eva s’intéresse davantage aux processus de création plutôt qu’au résultat. C’est pourquoi aucune compétence n’est requise pour y participer.

Eva, pouvez-vous nous expliquer votre parcours ?

« J’ai étudié le design au lycée et ai obtenu un bachelier en art plastique, visuel et de l’espace urbain à l’École Nationale Supérieure des Arts Visuels de La Cambre à Bruxelles. Au cours de ces années, j’ai appris à mener des enquêtes de terrain pour faire émerger des œuvres en relation avec un environnement et ses acteur·rice·s à partir de divers médiums tel que la photographie, le dessin, la vidéo, et autres. Il s’agit là, pour moi, d’une forme de la recherche-création : convoquer des outils de sciences humaines et sociales avec des lectures théoriques pour appuyer le processus de création d’une pratique sensible. Je m’intéresse particulièrement à l’artisanat, la géométrie et les relations entre art et science. C’est ainsi que, dans le cadre de mon année à l’ENS Paris-Saclay, j’ai fait mon stage dans le labo de métallurgie structurale ».

En quoi a consisté votre projet de création libre au sein de l’équipe Métallurgie Structurale ?

« Dans ma démarche, les paramètres de l’environnement dans lequel je crée sont essentiels. Je suis arrivée en stage avec l’intention de partager et apprendre “avec” ce domaine, en me coulant au plus proche de la pratique de la métallurgie pour en révéler une autre perspective. Il y a plusieurs dimensions à cette recherche, d’une part, celle de nommer cet univers, qui pour moi recèle de multiples imaginaires, et d’autre part, celle de faire et pratiquer.

À la suite d’entretiens avec l’ensemble des membres de l’équipe, d’un travail bibliographique et du suivi des différentes étapes de leur recherche, j’ai écris des textes à propos de chaque machine du laboratoire qui se situent entre le documentaire et la fiction. Ils relatent le quotidien de mon expérience et de celle des chercheur·euse·s. Ils sont affichés de façon poétique à côté de chacune des machines.

Pour la mise en pratique, je suis partie d’un coup de cœur personnel : des motifs géométriques générés à partir d’un programme de Denis Gratias, membre du laboratoire. Ce programme génère des symétries, dont la symétrie 18 modulable numériquement. Pour la rendre tangible, j’ai récolté auprès de chacun des 18 scientifiques du laboratoire, un objet en métal de leur quotidien : aluminium, capsules de champagne, cuillère, cymbale cassée, boîte de conserve, éprouvette, médaille de marathon, pièces de monnaie japonaise, ramasse-miettes de grille-pain. Les processus de mise en forme des objets récoltés ont suivi la méthodologie scientifique de ce laboratoire et sont consignés dans un “poster” scientifico-artistique, aussi affiché au laboratoire. Le résultat obtenu est un puzzle aimanté de 20 x 20 cm, composé de 153 pièces de métal sur une plaque d’acier. »

Qu’est-ce que cette immersion dans un laboratoire de recherche scientifique vous a apporté dans votre pratique ?

« J’ai appris et me suis rendu compte à quel point le métal est omniprésent dans notre société et dans notre vie quotidienne. C’est d’ailleurs cette réflexion, qui m’a fait comprendre qu’il y a un monde à découvrir dans un laboratoire qu’on ne s’imagine pas. Il y a là, un espace, qui n’est pas poreux, que l’art, par la recherche-création peut dévoiler en favorisant un dialogue sensible ».

Lola, vous êtes chargée de recherche CNRS au sein de l’équipe MS, pourquoi avoir choisi une stagiaire en art ? Quelle était votre démarche ?

« Lorsque j’ai rencontré Eva, il m’a semblé immédiatement que ce serait une occasion exceptionnelle pour moi de l’accueillir en stage. Le projet de stage a été discuté ensemble, pour qu’elle puisse trouver au laboratoire un environnement propice à la création. De mon côté, j’avais une demande de création d’ateliers artistiques pour le personnel de la recherche. Ceci venait d’une volonté de recréer des espaces de calme et de création, détachés d’une démarche de production, qu’on pourrait s’offrir comme des parenthèses pour aborder notre environnement de travail avec un autre regard. Les ateliers qui ont été organisés ont confirmé que les participants apprécient énormément ce moment, qui est à la fois doux et drôle, tout en mobilisant seulement une heure, c’est-à-dire un temps très acceptable dans une journée de travail ! En parallèle de ça, Eva avait toute liberté pour se consacrer à son travail de création artistique. Suivre les développements de son projet a été passionnant, car elle a impliqué les membres du laboratoire dans le processus, et ça a vraiment permis de créer des ponts entre elle et les autres membres de l’équipe, qui nous ont fait voir les choses autrement. Les échanges pendant ce 6 mois ont été très simples, et d’une grande richesse, peut-être même plus pour nous que pour elle ! ».

Lola, y aura-t-il une suite à cette collaboration ?

« J’espère ! Comme pour tout, il faut trouver des financements, des interstices où construire des petits bouts de projet, ce qui n’est pas forcément facile, une fois que la période officielle de stage est révolue. Mais les ateliers créatifs ont déjà été proposés dans le cadre d’une conférence, ce qui est super. On a aussi créé un « poster scientifique », qui est pour le moment dans le laboratoire, mais qui pourra être exposé ailleurs ! J’espère enfin que l’œuvre créée par Eva pourra être présentée dans des expositions ou festivals, pour que d’autres personnes puissent avoir le plaisir de la voir.

Quant à la suite, bien sûr, j’espère que d’autres projets naîtront de cette collaboration ! »

Cette collaboration inédite témoigne de la richesse du dialogue entre science et création, ouvrant de nouvelles perspectives de recherches. Elle illustre l’engagement de Chimie ParisTech-PSL en faveur des approches transdisciplinaires, essentielles pour innover et approfondir la connaissance des matériaux.

En savoir plus sur l’Institut de Recherche de Chimie Paris (IRCP).